arba-
Jean-Baptiste Barache & Sihem Lamine
/ Architectes



​​Architecte associé ​JL​.B​aldacci​

• Site: Rue Piat, Paris / île-de-France
• Surface: 870m2
• Budget: 2,5M €
• Matériaux: Panneaux de CLT, vêture mélèze et béton.
• Isolation: Laine de roche

Démarche environnementale:
• Solaire passif 

• Gestion informatisé de la ventilation naturelle et des apports caloriques
• Chauffe eau solaire
• Potagers + compost
• Poulaillers
• Ruches


Parti architectural

Cet immeuble absolument poreux à la ville dans tous ses composants, prend l'apparence d'un objet organique abstrait, qui pour être inédit dans ce quartier de Belleville n'en est pas moins avenant, chaleureux et mystérieux. Un galbe à peine prononcé (sur un rayon de 580m) lui donne une allure légère, à l'image d'une plante qui aurait pris le vent. Il se développe sur sept étages au dessus du rez-de-chaussée, et occupe la totalité de la hauteur plancher (31mètres).

Une vêture composée de montants de mélèzes verticaux à claire voie l'enveloppe sur trois côtés. Elle ménage sur la rue un espace intermédiaire entre l'intérieur des logements et la ville, en permettant de régler précisément l'intimité et la porosité entre l'immeuble et le quartier. Ces balcons généreux (de 1,5m de large au 1er étage à 1m au 7ème étage) ont la possibilité d'être partiellement clos, et de constituer alors un espace tampon thermique (utilisable pour des semis, et pour optimiser la prise d'air neuf des VMC).

Côté jardin, cet espace tampon prend la forme de profondes terrasses plantées. Elles sont composées d'un ponton bois en continuité des planchers intérieurs, puis de deux plate-formes, l'une au niveau du sol, l'autre à hauteur de garde-corps, chacune destinées à recevoir les jardinières. Ces plantations à feuilles caduques (potagers, fleurs, petits arbustes...) forment d'une part un paysage intercalé entre le logement et le panorama de Paris, mais constitue aussi un filtre aux rayons du soleil en donnant une subtile vibration à la lumière des intérieurs. La limite dedans/dehors, comme la limite espace public/espace privé, tend ainsi à s'estomper, pour donner l'impression de vivre dans un site, plus que dans un logement.

Le sous-sol, éclairé et ventilé naturellement, est conçu pour recevoir des espaces de travail (bureaux collectifs ou individuels, co-working, ateliers...), ainsi qu'un un local technique de 20m². Un dénivelé traité en talus accompagne le jardin jusqu'au sous-sol et permet de lui donner une vraie façade lumineuse. Le Rez-de-Chaussée (intérieur et extérieur) est pour sa plus grande partie ouvert, aux riverains en lien avec le tissu associatif du quartier pour des visites des potagers par les écoliers, des manifestations culturelles (repas, exposition, concert,...) Un traitement précis et soigné du filtre sur rue (claustra bois...), sans le dévoiler totalement, et en garantissant les principes de sécurité, rend le jardin entièrement perceptible aux passants. Il est bien sûr commun aux habitants de l'immeuble, et accueille une salle commune polyvalente de 50m² (repas, réunion, manifestation exceptionnelle, accueil d'association...), un hall de circulation généreux (boites à lettres, accès aux circulations verticales), une buanderie partagée, un local poubelle, un local vélo et poussettes, une partie des potagers et un poulailler en fond de parcelle, une aire de compostage. Une passerelle permet de relier, au dessus du vallon, la dalle du rez-de-chaussée au fond du jardin. Sur la rue Piat, une boutique anime la façade et contribue à connecter l'immeuble à la ville. Les circulations verticales et horizontales sont extérieures, couvertes et ensoleillées. Le Toit, autre lieu d'échange et de rencontre, est aussi commun et occasionnellement ouvert aux riverains. Il permet d'installer la plus grande partie des potagers, et les ruches, gérées par une association spécialisée. Les logements sont structurés en trois séquences : espaces de nuit, espaces humides, espaces de jour (depuis la rue vers le jardin). Ils sont de taille raisonnable, soulagés par des parties communes accueillantes et généreuses. Les habitants sont invités à prendre possession des lieux sans qu'il n'y ait aucun cloisonnement (autre que les refends structurels), puis à régler définitivement l’agencement des espaces après un temps d'usage qui permettra de précisément cerner les enjeux. Cela signifie que les lots techniques sont traités indépendamment du second œuvre (cheminements apparents et soignés sur chemin de câble, plinthes techniques dans l'épaisseur des chapes de plancher, le long des mur en CLT...) L'auto construction est ainsi proposée comme catalyseur de l'appropriation des habitants-constructeurs, et d'ajustement de l’économie du projet.


Construction :

D'un point de vue constructif, nous avons privilégié une ossature bois (CLT ou KLH) pour les étages et une structure béton pour le sous-sol et le rez-de-chaussée. Le bois est à la fois matériau structurel (qui permet de travailler en préfabrication, et de réduire le temps de chantier) et matériau de finition puisque nous laissons les panneaux de CLT toujours visibles à l'intérieur. La structure de l'immeuble se fait ainsi partout sentir, et l'habitant se promène dans une charpente plus que dans un appartement. Concernant les fondations, nous proposons sur cette parcelle au sol très décomprimé, de répartir la charge sur la totalité de l'emprise au sol par un radier béton épais, permettant ainsi de préserver les contraintes effectives au niveau interface sol structure après remise en charge du sol par le bâtiment.



Énergie :

Au-delà des questions de consommation et d'économie d’énergie, et du respect des réglementations thermiques (en cours et à venir), le projet se base sur les principes de l'architecture bio-climatique.

Nous proposons, avec l'appui d'Effilios, le bureau d'étude thermique qui nous accompagne depuis quelques années, un immeuble qui pour être agréable et confortable, sera sans chauffage, sans ventilation mécanique, et sans climatisation, prolongeant ainsi l'initiative de nos confrères autrichiens BE-Baumschlager eberle avec leur bâtiment manifeste 2226. Cela correspond pour nous à l'intime conviction que l'économie d’énergie va de pair avec une sobriété technologique, et par là même, avec une sobriété économique. Nous avons tous l'expérience de la douce chaleur du soleil d'hiver à travers une paroi vitrée, du courant d'air dans un logement ayant deux façades opposées....et nous souhaitons placer ces sensations à la base du dispositif énergétique, sans transiter par des technologies complexes. L'effet de serre est ainsi optimisé et maîtrisé, et tous les logements sont traversants pour permettre la ventilation naturelle.

Si nous tendons autant que faire se peut à nous passer de machines technologiques, nous nous appuyons volontiers sur un logiciel intelligent de contrôle des flux énergétiques qui agira sur les différents organes du bâtiment. Ainsi, la chaleur résiduelle des ordinateurs, des téléviseurs, des machines à laver, frigo, ou autres électroménager des habitants, l'éclairage des locaux, et plus efficacement le rayonnement solaire, suffiront à apporter les calories nécessaires au bâtiment. Un procédé aidé par la conception même du bâtiment, pensé pour offrir des conditions optimale à la gestion des flux d'énergie. La faible inertie des murs de bois sera compensé par une chape minérale (ou un sol épais de terre cuite) à chaque niveau. Celle-ci servira de réservoir à calories sur une phase de 12h, et permettra de traverser les fenêtres thermiques défavorables (nuit l'hiver, jour l'été). Nous gardons 8 capteurs solaires (tubes sous vides) pour la production d'eau chaude sanitaire (et en cas de besoin à l'issue du bilan thermique, pour l’alimentation de planchers chauffants). Un dispositif de récupération des eaux de pluie permet d'alimenter les robinets de puisage pour l'arrosage des potagers, et les toilettes.

Nous avons également la conviction que l'économie d’énergie passe nécessairement par une remise en question des critères de confort et voulons dans notre immeuble expérimenter d'autres manière d'habiter, de se réchauffer, de vivre ! Pouvons-nous par exemple imaginer ne pas chauffer jour et nuit tous les espaces du logement ? Et plutôt phaser la climatisation dans le temps et l'espace ?